“Les femmes et l’alcool”, Gérard Haddad: l’autre jouissance…

Gérard Haddad est venu nous parler de ses conceptions à propos de l’alcool au féminin lors du colloque de l’Aleph à Lille, cette année. C’est pourquoi, je suis très sensible et heureux d’apprendre que son travail abouti à l’édition de son livre sur le même sujet: “Les femmes et l’alcool, Quatre récits d’un psychanalyste”, chez Grasset.

L’interview que je vous reproduis ci-dessous permet de cerner l’objet de son livre. Il s’inscrit dans le parcours théorique déjà initié avec “Manger le livre”, un ouvrage précédent qui lui permet de penser que l’alcool est un substitut du livre, un équivalent symbolique. “Parce qu’il brule la bouche comme du feu”.

Haddad pose l’utilisation de l’alcool par les femmes comme l’effet d’une “mutilation subie”, la réponse à “un désir bafoué”. Cette réponse du sujet tend vers “un suicide lent et masqué”.

Donc, très logiquement, Haddad nous explique qu’il ne s’agit pas de savoir comment sortir de l’alcool, mais de se demander pourquoi l’on y entre. Ce qui est une position classique des psychanalystes depuis Ferenczi. Ce qui démasque aussi la bêtise de qui voudrait s’aventurer à maitriser la chose.

Haddad fait tourner la catastrophe qui conduit une femme à l’alcool, autour du désastre et de la déroute d’un pacte symbolique qui existerait dans la maternité. Il ne faut pas se tromper sur ses termes. Haddad n’a pas une conception étroite de cette maternité. Il l’élargit à la demande adressée au partenaire qu’il tienne sa place dans le couple. Dans le cas où ce ne serait pas le cas, c’est-à-dire dans celui où le partenaire masculin lui refuserait de pouvoir s’échapper, le refus, la “profanation” de cette autre jouissance équivaudrait à une mutilation.

Ce point est très discutable, il pourrait même nous laisser entrevoir que Haddad a beaucoup de mal à assimiler cette notion compliquée de Lacan. C’est placer la maternité avant tout, même si son désir est impérieux. C’est surtout penser que l’autre jouissance serait contingente, déterminée par ce fameux pacte, s’il existe. Ce dont l’on peut douter.

Et ce n’est pas le recours à un néologisme comme celui de “pa(ma)ternité” qui pourrait nous rassurer là dessus.

Mais, son idée est pourtant intéressante car elle ouvre à une approche inédite de l’alcool pour les femmes. Elle permet à Haddad d’articuler son intuition, étayée par ses observations cliniques, à “la débacle du signifiant paternel dans la société (…) et du livre”. C’est peut-être une piste utile pour la suite de la réflexion.

Enfin, ce livre fait plaisir. Il ouvre les questions et nous change du baratin habituel de nos chers alcoologues.

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Gérard Haddad : « Une toxicomanie à portée de main » |

LE MONDE, le 18.12.09, Propos recueillis par Josyane Savigneau

Gérard Haddad a été en analyse pendant douze ans avec Lacan, à partir de 1969, et est devenu psychanalyste. Il est l’auteur de plusieurs livres, dont Manger le Livre (Grasset, 1984), Le Jour où Lacan m’a adopté (Grasset, 2002), et vient de publier Les Femmes et l’alcool. Quatre récits d’un psychanalyste (Grasset, 136 p., 12 euros).

“ Pourquoi cet intérêt pour l’alcoolisme, et spécifiquement celui des femmes ?

Parce que c’est un problème important et de plus en plus grave, une toxicomanie à portée de main, parfois au bas de son immeuble. C’est aussi un problème aux multiples aspects qui n’ont rien de médical, un problème quasi métaphysique.

On se pose souvent la question : comment en sortir ? Rarement celle-ci : pourquoi on « y entre » ? C’est à cette question que j’espère apporter un début de réponse, soumise au public, à la vérification de mes confrères attelés à cette question. Selon moi, la cause de l’alcoolisme est à rechercher dans les impasses et les catastrophes qui surviennent dans l’accession des femmes et des hommes à la fonction, éminemment symbolique, qui règle la reproduction de notre espèce. Impasses survenant chez certains hommes face à la paternité, désastres pour les femmes dans leur désir de maternité. A travers les quatre récits qui forment mon livre, j’ai voulu explorer certaines faces de ces impasses et de ces désastres. Ce n’est peut-être pas la seule cause de l’alcoolisme, mais c’en est une essentielle.

Cette question a fait irruption dans ma pratique, un jour déjà lointain, quand une jeune femme ivre, soutenue par son mari, est entrée dans mon cabinet. Elle consommait depuis quelques mois d’énormes quantités d’alcool. Pourquoi ? Il m’a fallu des mois de patience pour trouver une réponse : au cours d’une opération pour appendicite, le mari avait soudoyé, à l’insu de sa femme, le chirurgien (cela se passe dans un pays lointain) pour qu’il la stérilise. La chose lui est annoncée au réveil. Elle crâne, elle dit qu’ainsi elle ne prendra plus cette pilule qui la gênait. Mais quelques mois plus tard débutèrent les prises massives de whisky. Etrangement cette femme n’établissait aucun lien conscient entre la mutilation subie et son alcoolisme. Je n’ai pas cessé, depuis lors, de penser à cette histoire, devenue pour moi le cas princeps.

Dans d’autres cas, c’est un avortement forcé, c’est-à-dire effectué contre son désir, qui provoque cette addiction chez une femme. C’est l’histoire d’Ilse, rapportée dans Le Livre brisé de Serge Doubrovsky, laquelle, après trois cruels avortements imposés, sombre dans l’alcool jusqu’à en mourir. Mais une femme qui boit ne fait pas le lien entre son désir bafoué et l’addiction qui lui succède quelque temps après. Du même coup, cette cause passe inaperçue. Il m’a fallu des mois pour la mettre au jour.

Selon vous, l’alcoolisme des femmes est différent de celui des hommes. Et pas seulement parce qu’elles en ont honte.

Cela mérite un détour. J’affirme qu’il existe un pacte symbolique fondamental entre hommes et femmes, conséquence de l’universel interdit de l’inceste, qui règle la reproduction de notre espèce. Il n’y a pas d’un côté la paternité aux relents de patriarcat et de l’autre la maternité qui confinerait la femme à ce rôle. C’est une seule et même fonction que j’ai appelée « pa(ma)ternité ». Et ce sont les désastres survenant autour de cette fonction qui peuvent conduire à l’alcool et à la drogue.

Par rapport à ce pacte, la position des hommes et celle des femmes ne sont pas symétriques. Exactement comme l’oedipe féminin n’est pas en miroir de l’oedipe masculin. La femme, avant de se tourner vers le père – et tous les substituts qui le remplaceront – a dû renoncer à son désir pour sa mère, renoncement que Freud appelle castration, placé donc pour elle au début de sa maturation sexuelle. Chez l’homme par contre, cette même castration se situe en fin de son oedipe.

Cette différence de structure détermine les modalités différentes du rapport à l’alcool dans les deux sexes. Pour le dire brièvement, l’homme qui s’adonne à l’alcool est un sujet qui ne parvient pas, ou très mal, à accéder à cette place symbolique de père. Pour la femme, c’est la destruction de son désir ou la profanation de sa fonction symbolique dans la maternité à laquelle elle paraît d’emblée prête, qui cause ce désastre. Or il y a de nos jours une certaine déroute de cette pa(ma)ternité.

Et la femme qui boit est pour vous une femme blessée, profanée dans sa volonté d’être mère.

Il ne s’agit pas de maternité, mais de désir, et pas seulement d’un désir de maternité. C’est aussi le désir que le partenaire dans l’aventure tienne dignement sa place dans le pacte dont je parlais, cela dans l’intérêt de leur commune progéniture. Dans mon livre, je rapporte le cas d’une femme, mère de plusieurs enfants, dont le mari, à un moment de leur histoire, a déchu dans cette dignité, et ainsi a mis en danger leurs enfants. En réaction, elle s’est mise à boire.

Le désir d’accéder à la maternité est généralement clair chez la femme : elle veut ou elle ne veut pas. Quand elle veut, et cela peut venir tard, ce désir est impérieux. Elle y accède d’emblée dans l’angoisse et dans un sentiment d’urgence. Mais si l’homme investi de son amour, de sa confiance, de la totalité de son être, dont elle désire un enfant, la bafoue, la profane dans ce désir, comme dans les cas cités, il se peut alors qu’elle plonge dans l’addiction qui n’est rien d’autre, en définitive, qu’un suicide lent et masqué.

Il y a aussi dans l’amour d’une mère pour son enfant quelque chose d’énigmatique, une jouissance non phallique, comme disait Lacan, qui comparait cette jouissance à celle des mystiques. Et les hommes supportent mal que leur compagne leur échappe dans cette jouissance-là qui n’a rien de biologique et qui lui est indispensable. La lui refuser, c’est la mutiler.

Dans votre livre vous abordez, à travers quatre cas, des questions théoriques.

Si je me suis tant intéressé à ce premier cas, c’est qu’à ce moment-là j’entreprenais un important travail théorique, à mes yeux véritable et profonde transformation de la théorie freudienne classique. Dans la théorie du père chez Freud, telle qu’énoncée dans Totem et tabou, quelque chose ne tient pas. Cette histoire d’un père primitif assassiné puis dévoré par ses fils, cette dévoration cannibalique permettant aux fils l’accès à leur identité, c’est peut-être une intuition géniale mais à reformuler entièrement. Ce que j’ai fait à travers l’analyse des rites alimentaires et ce qui m’a conduit à cette thèse : le sentiment d’identité, d’appartenance à un groupe donné, sans lequel on ne trouve sa place nulle part, et en particulier dans la grande affaire de la reproduction de l’espèce, découle de l’incorporation du Livre fondateur du groupe donné. Cette théorie, je l’ai consignée dans mon essai Manger le Livre. Cette question de l’alcool est venue d’elle-même à travers l’analyse d’ouvrages comme Au-dessous du volcan, de Malcolm Lowry, ou Hedda Gabler, d’Ibsen. Il m’est apparu que l’alcoolique est celui qui n’a pas ou mal incorporé le Livre. L’alcool est un substitut du Livre parce qu’il brûle la bouche comme du feu. Or l’analyse structurale de certains passages bibliques, ceux qui rapportent les visions d’Isaïe, d’Ezéchiel et l’Apocalypse de Jean, m’a montré que le feu est l’équivalent du Livre, du symbolique. Ce sont des questions qu’on ne peut résumer en quelques lignes. Ce livre Les Femmes et l’alcool prolonge la réflexion entamée dans Manger le Livre.

Plus généralement, d’où vient l’alcoolisme des jeunes gens aujourd’hui ?

Cela me paraît en relation directe avec ce que nous disions. L’extension des addictions est une conséquence de la débâcle du signifiant paternel dans notre société, débâcle de la pa(ma)ternité, débâcle du symbolique et du Livre ”.

Lévi-Strauss, sa définition du bricolage concerne la psychanalyse….

En lisant Claude Levi-Strauss, nous pouvons penser que sa définition du bricolage concerne la psychanalyse de près….

La voici : crise_moderne01_250

« Le bricoleur est apte à exécuter un grand nombre de tâche diversifiées ; mais, à la différence de l’ingénieur, il ne subordonne pas chacune d’elles à l’obtention de matières premières et d’outils, conçus et procurés à la mesure de son projet : son univers instrumental est clos, et la règle de son enjeu est de toujours s’arranger avec les « moyens du bord », c’est-à-dire un ensemble à chaque instant fini d’outils et de matériaux, hétéroclites au surplus, parce que la composition de l’ensemble n’est pas en rapport avec le projet du moment, ni d’ailleurs avec aucun projet particulier, mais est le résultat contingent de toutes les occasions qui se sont présentées de renouveler ou d’enrichir le stock, ou de l’entretenir avec les résidus de constructions et de destructions antérieures.

L’ensemble des moyens du bricoleur n’est donc pas définissable par un projet (ce qui supposerait d’ailleurs, comme chez l’ingénieur, l’existence d’autant d’ensembles instrumentaux que de genres de projets, au moins en théorie); il se définit seulement par son instrumentalité, autrement dit et pour employer le langage même du bricoleur, parce que les éléments sont recueillis ou conservés en vertu du principe que « ça peut toujours servir ».

De tels éléments sont donc à demi particularisés : suffisamment pour que le bricoleur n’ait pas besoin de l’équipement et du savoir de tous les corps d’état mais pas assez pour que chaque élément soit astreint à un emploi précis et déterminé. Chaque élément représente un ensemble de relations, à la fois concrètes et virtuelles ; ce sont des opérateurs, mais utilisables en vue d’opérations quelconques au sein d’un type ».

Claude Lévi-Straus,

La Pensée sauvage, Paris, Ed. Plon, 1960, p 27

 

Résolution de soutien à l’appel public des Psychanalystes et Psychothérapeutes britanniques concernant la situation de la Psychothérapie et de la Psychanalyse en Grande-Bretagne

 







Participants à textura, un groupe psychanalytique orienté par Freud et Lacan à Köln (Cologne, Allemagne), nous sommes très préoccupés d’apprendre que la pratique de la psychanalyse pourrait bientôt devenir impossible en Grande‐Bretagne du fait que la plupart des pratiques psychanalytiques seraient rendues illégales. Il s’agit des standardisations actuellement envisagées de la psychothérapie, dans laquelle le législateur britannique inclut aussi la clinique psychanalytique et sa pratique dans la cure analytique. Le Health Professions Council britannique a reçu pour mission d’établir des standards nationaux pour toute activité psychothérapique. A cet effet ont déjà été élaborées plus de 450 règlementations qui s’appliqueraient à toute thérapie psychanalytique. Feraient partie de ces prescriptions, qui se verraient imposées à chaque psychanalyste mais aussi à chaque thérapeute, des règlements qui fixeraient presque tous les aspects du cadre, de la pratique et du style du travail psychanalytique et psychothérapique. Elles concerneraient, par exemple, le moment, où une intervention devrait être posée, des instructions sur l’expression de « sentiments appropriés », jusqu’au but recherché par ce processus. La fin d’une cure psychanalytique comme de diverses psychothérapies ne serait donc conditionnée ni par la parole de ceux qui s’adressent à un psychanalyste ou à un psychothérapeute, ni par l’orientation de celui‐ci, ni par la singularité de l’accomplissement de chaque travail. L’espace à protéger du travail analytique et psychothérapique serait ainsi détruit et rendu impossible. Comme nous avons pu le savoir, la grande majorité des psychanalystes praticiens ainsi que des psychothérapeutes en Grande‐Bretagne – malgré leurs différences théoriques – s’accordent sur le fait qu’une telle intervention est inacceptable pour tous ceux qui pratiquent la psychanalyse en tant qu’analysant ou analyste, et qu’en outre différentes formes de psychothérapie deviendraient impossibles du fait de ne pas être « standardisables ».


Orientés par Lacan, nous sommes convaincus que cette régulation de la psychanalyse et de la psychothérapie qui est poussée à l’ extrême en Grande‐Bretagne, mais qui existe dans toute l’Europe, contredit fondamentalement non seulement la théorie et la pratique des découvertes Freudiennes, dont principalement l’inconscient, mais aussi les travaux d’autres psychanalystes qui ‐chacun à sa façon‐ ont poursuivi la cause de Freud et ses questions. La lecture par Lacan de l’oeuvre de Freud et ses apports à la pratique et la théorie de la psychanalyse nous montre le chemin à suivre. Cette orientation comprend également ce que Lacan a lui‐même toujours prôné : la considération et l’interrogation des écrits et de la pratique des collègues appartenant à d’autres courants. En Grande‐Bretagne, nommons parmi eux principalement Mélanie Klein, Winfred Bion, Donald Winnicott et Michael Balint. Nous recevons ces ordonnances britanniques si menaçantes également comme une attaque destructrice envers la tradition psychanalytique et sa transmission.


Nous rappelons que la formation du psychanalyste comprend de grandes exigences quant à la qualité de ce travail. En font partie une très longue expérience personnelle de la cure psychanalytique, la lecture des textes fondateurs de la psychanalyse, la participation à des séminaires et groupes de travail, ainsi que la supervision et l’analyse de contrôle. Comme il ne s’agit pas ‐en ce qui concerne la psychanalyse‐ d’une technique « standardisable », mais d’une éthique toujours ouverte à ceux qui viennent avec leur souffrance singulière à la cure par la parole, la psychanalyse ne peut être transmise qu’à travers des cheminements de formation qui durent des années et qui ne sont pas réglables par l’Etat. Ceci implique également, que les psychanalystes sont constamment appelés depuis Freud à questionner leur travail, à échanger de façon critique avec leurs collègues, à reprendre toujours à nouveau leur propre analyse ou à retourner en supervision. L’évaluation requise du travail psychanalytique existe bel et bien depuis son début dans une forme propre et souvent particulièrement intense. Lacan tout particulièrement, mais aussi Freud, ont en outre toujours incité les psychanalystes à analyser de façon critique la mesure du savoir de leur temps.

La transmission de l’expérience particulière de la psychanalyse est soumise à des conditions spécifiques. En font partie sa temporalité propre ainsi que la nécessité de concepts qui tiennent compte du fait qu’il s’agit en psychanalyse finalement de quelque chose d’indisponible. Ceci échappe à la logique de notre société marquée par le néo‐libéralisme. La psychanalyse examine et explore le lien social entre les humains, ainsi que les formes dominantes de la science en questionnant leurs formes de discours et leur rapport au subjectif dans le sens du singulier.


Nous avons l’impression que la psychanalyse et la psychothérapie sont de plus en plus appelées à devenir les moyens d’un contrôle étatique ou social, voire même judiciaire. Il est par l’exemple déjà avéré qu’en Grande‐Bretagne des citoyens soupçonnés de terrorisme doivent être saisis et « traités » dans des cabinets de psychanalystes, ce qui ferait office d’une rééducation.


Toutes ces évolutions méconnaissent qu’il ne s’agit pas en psychanalyse du statistiquement « normable », du rapidement saisissable et fixable, mais du singulier de la parole dans la rencontre entre l’analysant et l’analyste, qui a rapport à des règles de jeu « qui doivent puiser leur signification dans le contexte du plan de jeu » (Sigmund Freud : Zur Einleitung der Behandlung (1913), GW VIII, p.454). Ceci correspond à la cure analytique en tant que travail de culture et contredit l’idée du « citoyen transparent », de la création de normes pour tout et de la possibilité de contrôler les processus de socialisation. Dans cette mesure, nous ne considérons surtout pas les événements en Grande‐Bretagne et dans d’autres pays d’Europe, l’Allemagne y comprise, dans le sens d’intérêts catégoriels proprement dits. Pour nous, l’essence de la psychanalyse que Freud a nommée « travail de culture » est entièrement en jeu. Il s’agit quant à cette essence de l’affirmation de la loi du désir humain face à un Autre compris comme un tout, de l’ Autre de l’Etat et de son autorité. A travers la tentative d’une règlementation de la cure psychanalytique, la « normation » est par contre élevée au niveau de la « loi ».
Pour nous, en Allemagne, ainsi que pour nos collègues anglais, les Etats Généraux en France qui ont pu collecter plus de 15000 signatures en juillet 2008, représentent un espoir. Celles‐ci s’adressent à l’Assemblée Nationale contre d’avantage de régulation des conditions requises pour une installation comme psychothérapeute et pour renforcer le poids de la psychanalyse. Ces « Etats Généraux » comprennent également des psychanalystes de courants théoriques différents.

Nous soutenons avec insistance par cette résolution, également dans le cadre de la solidarité avec le College for psychanalysts à Londres, ainsi qu’avec le Center for freudian and analytic research, les efforts de nos collègues anglais pour rendre intelligible aux administrations sanitaires et aux hommes politiques de leur pays la valeur d’une psychanalyse aussi peu réglementée que possible par l’Etat, et ceci également dans le sens de la tradition démocratique de la Grande‐Bretagne qui donne une valeur particulière au citoyen émancipé. Nous parions par ailleurs sur le fait que le pays qui a accueilli Sigmund Freud lors de son émigration va rester fidèle à la tradition de cette hospitalité par rapport à la psychanalyse, ainsi que pour la transmission de l’oeuvre de ceux qui en Grande‐Bretagne ont repris la cause Freudienne et ont continué à la développer.

Ainsi, nous nous adressons à nos collègues de l’Assoziation für die Freudsche Psychoanalyse (Association pour la psychanalyse Freudienne), des archives Lacan à Brégence (Bregenz), de la Freud‐Lacan‐Gesellschaft (Association de psychanalyse, Berlin), du Psychoanalytisches Kolleg (Collège clinique psychanalytique), du Lehrhaus für Psychoanalyse (Ecole de psychanalyse) à Hambourg, du Kasseler Forum für Psychoanalyse (Forum de psychanalyse) à Kassel, pli à Munich, du Psychoanalytischer Salon Berlin ( Salon psychanalytique à Berlin), du Lacan Seminar à Zürich et du Neue Wiener Gruppe (Nouveau groupe de Vienne, Autriche), avec lesquels nous travaillons depuis de longues années.

Au‐delà de ces associations (germanophones), cet appel et la demande de le signer s’adresse également aux autres cercles psychanalytiques, ainsi qu’à tous ceux qui accordent de la valeur à la cause Freudienne et à la psychanalyse en tant que travail de culture.

Nous allons remettre cette liste de signatures à nos collègues anglais en février 2009 et la communiquer aux Etats Généraux en France dans le cadre de leur engagement « Sauvons la clinique ». Jusque‐là, nous vous invitons à joindre votre signature à cet appel en l’adressant à l’adresse mail de Michael Meyer zum Wischen, Psychanalyste à Köln, Allemagne : praxismzw@web.de

Traduction par Gabrielle Devallet‐Gimpel (Toulouse)

Les auteurs

Klaus Findl, bildender Künstler, Köln

Miriam Goretzki-Wagner, Coach, Bonn

Andreas Hammer, Dipl.-Psych., Köln

Fotini Ladaki-Schmidt, Dipl.-Psych., psychoanalytische Praxis, Köln

Béatrice Ludwig, Linguistin, Köln

Jean-Baptiste Mariaux, PhD., Köln

Dr. med. Michael Meyer zum Wischen, psychoanalytische Praxis, Köln

Karin Schlechter, bildende Künstlerin, Köln

Les signataires:

Karin Adler, Psychoanalytikerin, Paris

Eckhard Bär, Psychoanalytiker, Sozialarbeiter, Suchtherapeut, Kassel

Ute Bergmann-Näher, Ärztin, psychoanalytische Praxis, Rottenburg / Tübingen

Michel Borsotto, Psychoanalytiker, Coaraze Andréa Bryan, bildende Künstlerin, Köln

Cristina Burckas, Lic. Psych., psychoanalytische Praxis, Freiburg

Christine Chagneaud, Psychologin, Psychoanalytikerin, Albi

Patrick Coadou, Employé mairie, Villeneuve Les Bouloc, Psychopathologie clinique université du Mirail, Toulouse.

Prof. Dr. Marcus Coelen, Institut für romanistische Philologie LMU München, Psychoanalytiker, München

Geneviève Condou, Klinische Psychologin, Toulouse

Gabrielle Devallet-Gimpel, Psychiaterin, Psychoanalytikerin, Blagnac

Harold Dielmann, Dipl.-Psych., psychoanalytische Praxis, Köln

Dr. U. Oudée Dünkelsbühler, Dozentin und Psychoanalytikerin, Hamburg

Dr. phil. Susanne Gottlob, Psychoanalytikerin, Hamburg

Marylène Guery, Dipl.-Psych., psychotherapeutisch-psychoanalytische Praxis, Köln

Annemarie Hamad, Psychoanalytikerin, Paris

Maire Jaanus, Professor of English and Comparative Literature, Barnard College/Columbia University, New York, NY

Franz Kaltenbeck, Psychoanalytiker in Paris und Lille, sowie in der medizinisch-psychologischen Abteilung der Haftanstalt Sequedin am Centre Hospitalier Régional Universitaire de Lille

Eva Kiefer, psychoanalytische Praxis, Salzburg

Bernhard Kreuz, Dipl.-Psych., psychoanalytische Praxis, Neckartenzlingen / Tübingen

Ursula Lefkowitz, Psychoanalytikerin, Rambouillet

Dr.med. Chrisian Kläui, Psychiater und Psychoanalytiker, Basel

Christian Kohner-Kahler, Bewährungshilfe, Universität Wien, FH Linz

Corinne Maier, Psychoanalytikerin, Brüssel

Barbara Meyer zum Wischen, Dipl.-Psych., psychotherapeutische Praxis, Köln

Dr.med. André Michels, Psychiater und Psychoanalytiker, Luxemburg und Paris

Catherine Moser-Fride, Dipl.-Psych., Paris IV Sorbonne, psychoanalytische Praxis, Elchingen (bei Ulm)

Andreas Gottfried Müller, Dip.-Psych., psychoanalytische Praxis, Bremen

Dr.med. Peter Müller, Arzt und Psychoanalytiker, Karlsruhe

Susanne Müller, Dipl.-Psych., Kunstwissenschaftlerin, Paris

Prof. Dr. Karl Josef Pazzini, Koordinator des Psychoanalytischen Kollegs; Universität Hamburg, Fakultät für Erziehungswissenschaft, Psychologie und Bewegungswissenschaft, Sektion 1, Bildungstheorie, Bildende Kunst, Hamburg

Univ.-Prof. Dr. August Ruhs, Universitätsklinik für Psychoanalyse und Psychotherapie, Wien

Avi Rybnicki, Psychoanalytiker, Tel Aviv

Pieretta Sakellariou, psychologue clinicienne, plasticienne, Toulouse

Marie-Jean Sauret, psychanalyste (APJL), professeur des universités, Toulouse Dr.med Georges Schmit, psychoanalytische und psychiatrische Praxis, Brüssel

Dr. phil Bernhard Schwaiger, Dipl.-Psych., psychologischer Psychotherapeut, Neustrelitz

Madlen Sell, Dipl.-Psych., Freiburg i. Br.

Véronique Sidoit, Psychoanalytikerin, Paris

Khadija Taoujni, Étudiante en psychothérapie, Paris

Laure Thibaudeau, Psychoanalytikerin, Paris

Dr. med. Michael Turnheim, Universitätsdozent, Psychiater, Psychoanalytiker, Wien, Paris

Dr. Johanna Vennemann-Bär, psychologische Psychotherapeutin, Psychoanalytikerin, Hann.-Münden, Rom

Rivka Warshahawsky, Psychoanalytikerin, Klinische Psychologin, Israel

Mai Wegener, psychoanalytische Praxis, Berlin

Dr. phil. Peter Widmer, psychoanalytische Praxis, Zürich

Mag. Dr. phil. Markus Zöchmeister, psychoanalytische Praxis, Salzburg

 

Appendice

THE COLLEGE OF PSYCHOANALYSTSUK PRESS RELEASE

Under proposed new government guidelines, most forms of psychoanalysis could become illegal in 2009. The Government aims to regulate talking therapies next year and has already started the process of assessing the field. The Health Professions Council has been given the task of regulating talking therapies, with its partner Skills for Health (SfH) charged with developing National Occupational Standards for therapeutic work. Nearly all the psychotherapy and psychoanalytic organisations protested that HPC was inappropriate for talking cures, yet this has been totally ignored and HPC imposed as the regulator. The psychodynamic and psychoanalytic organisations in this country are already regulated by two main bodies (UKCP and BPC) which have been developed through the profession over the last twenty-five years. Each of the member organisations of UKCP and BPC has strict codes of ethics, practice and complaints procedures, and is inspected periodically by the regulatory body. Yet the new developments will render the existing regulatory structures for the most part obsolete. With this comes a new vision of what psychodynamic and psychoanalytic work actually is. For HPC and SfH, psychoanalytic work is seen more as an intervention to be applied – like a drug – TO patients than a long and painstaking work done BY patients. This view of therapy as an external intervention is reflected in the government’s plan to ‘give’ therapy to young Muslims they suspect of harbouring aspirations to terrorism: psychotherapy becomes a tool of social control rather than a choice made by the individual to explore their own life. A consultation process was begun by SfH in 2007, and the results just published in draft form.More than 450 rules have been listed for psychodynamic and psychoanalytic therapy. They dictate every aspect of how therapists should organise their sessions, how they should ‘monitor’ themselves and how they should carry out their work. They go into minute detail about the timing of interventions, the setting of the therapy, its aims – and even the expression of appropriate ‘feelings’. Such an application of externally-imposed rules – most of which were expressly contraindicated by Freud, Jung and the analysts who followed, such as Klein, Lacan and Winnicott – removes the very foundation on which such therapies are based, namely the freedom of both parties to work together authentically and creatively. If these rules are accepted, then it will no longer be possible for analysts – and many therapists – to work in this country. The SfH project shows how analytic work is being forced into the current culture of outcomes, where everything can be predicted in advance and evaluated in relation to the expected results. Analysis, however, involves an open-ended relationship, where results may emerge that were never predicted or even thought of by the person in analysis. The very distinction between conscious and unconscious motivation that lies at the heart of analytic work is ignored by the proposed regulations which encourage a ‘false self’, a box-ticking clinician, always fearful of being watched by the authorities and anxious to please them. If analysis has an aim, it is to help patients free themselves from irrational forms of authority, exactly those that now threaten to constrain the work of analysts. According to the government roadmap, HPC will establish a list of reputable practitioners, which will mean effectively those who adopt their particular formulations as to what psychoanalysis is about. All the documentation published to date by HPC shows a serious misunderstanding of the nature of analytic work, together with a new insistence on ‘good character’ defined in highly rigid ways. If this goes ahead, then members of the public will no longer have the freedom to choose their analyst. Rather, they will have to select a practitioner from a list which only includes those who practise a particular form of therapy. How did this situation come about after the long process of consultation with the profession? The working parties at SfH which have drafted the new rules are made up almost exclusively of members from one single highly partisan grouping, concerned to define psychoanalytic psychotherapy in a very narrow frame. This narrow frame fits a particular technique developed by the Chair of the SfH National Strategy Group together with the Chair of the SfH Working Group known as ‘Mentalization Based Therapy’ (MBT). Some research shows evidence for the value of this technique for particular NHS patient categories, but it represents a tiny minority of the total psychoanalytic therapy that is undertaken, mostly in the private sector. Its techniques and ethical framework are entirely opposed to most traditional psychoanalytic work. The Working Group and the National Strategy group, under these chairs, have excluded contributions which do not meet this narrow frame. SfH had promised seats on the working parties to representatives of other groupings, yet these were then withheld and SfH have admitted that they have not chosen to develop their work democratically. Requests for documents about the consultation process obtained under the Freedom of Information Act have shown astonishing failure to follow proper procedures and the hijacking of the consultation by a small and ambitious group of individuals. Thousands of therapists have been writing to MPs and politicians about the current situation, seeking a recognition of the fact that analytic work cannot be reduced to a set of rules to be mechanistically applied to a patient with predictable outcomes, but involves an exploration of the meaning of an individual’s history which can never be guessed in advance. Analytic work, for the majority of analysts, should be regulated by the bodies established by the profession and not by the State. For more information contact:

Haya Oakley (Site for Contemporary Psychoanalysis) – 07929 559 817 Julia Carne (Psychoanalytic Consortium) – 07774 903204 Darian Leader (Centre for Freudian Analysis and Research) – 07952 520 540 Sian Ellis (Association for Group and Individual Psychotherapy) – 07949 088 963 Joe Suart (The Guild of Psychotherapists) – 07772 510 475 Anne Worthington (The Guild of Psychotherapists) – 07904 870

 

Fument-ils en dormant ?, par Laurent Greilsamer

Voici la preuve de la validité de la notion de surmoi freudien et de celle de retour du refoulé, selon Laurent Greilsamer dans Le Monde :

" C’est une information sidérante qui n’a occupé que quelques lignes ou une poignée de secondes dans les médias : les fumeurs français fument toujours autant. Autant dire que la loi qui interdit de fumer dans les cafés, les bars-tabac et les restaurants depuis janvier 2008 n’a pas permis de faire reculer une consommation insolente.

Les fumeurs ont grillé 54 milliards de cigarettes cette année, ni plus ni moins qu’en 2004 ou 2005. Ils fument obstinément, obsessionnellement, et la première question qui vient à l’esprit, teintée d’un étonnement admiratif, c’est : comment font-ils ? Partant du principe que les Français travaillent chaque jour huit heures, qu’ils en passent deux dans les transports, deux dans les brasseries, quatre à regarder la télévision, et finalement huit à dormir, quand trouvent-ils donc le temps de fumer leur paquet quotidien ?

Oui, comment les Français font-ils pour rattraper le temps perdu ? Consomment-ils désormais leur ration à la chaîne ? Fument-ils en regardant la télévision, au risque de distraire une parcelle de leur cerveau disponible aux annonceurs et aux publicitaires ? Fument-ils en mangeant ? Mastiquent-ils en même temps nicotine et protéines, picotin et picotine ? Fument-ils au lit ? Fument-ils en dormant ? Questions bouleversantes qui obligent à reconsidérer totalement l’usage du temps de nos contemporains et inclinent à penser que le fait de fumer constitue pour certains un trait quasi existentiel.

Vous voulez interdire le tabac ? Vous croyez pouvoir enrayer la consommation de cigarettes ? Vous rêvez ! Des forces obscures, des forces proprement humaines résistent. En réalité, vous stimulez l’envie, la tentation. Car les chiffres publiés sont trompeurs en faisant croire à des ventes étales. L’interdiction de fumer dans les cafés, couplée à une augmentation régulière des tarifs des blondes et des brunes, stimule en fait les pulsions d’achat. Aux 54 milliards de cigarettes écoulées officiellement cette année, il faut ajouter les achats hors de France par les populations frontalières et l’explosion durable de la contrebande. Sans compter que la crise économique et le stress favoriseront en 2009 le tabagisme, comme c’est déjà le cas aux Etats-Unis

Faut-il en conclure que la loi appliquée depuis janvier 2008 est un fiasco ? Non, bien sûr ! Ce texte consacre la victoire des non-fumeurs, hier obligés d’inhaler la fumée des autres. Il a rendu un "nez" à des millions de citoyens privés de leur flair au point qu’ils ne savaient plus distinguer l’ail de l’oignon, le bordeaux du bourgogne, ni l’air des villes de celui de la campagne.

Mais surtout, ce texte confirme qu’il est vain d’espérer – que ce soit en claquant des doigts ou en promulguant des lois – la naissance d’un homme nouveau, sans addiction, sans vice. La courbe des ventes de cigarettes en France démontre à la perfection qu’on ne peut renoncer à un vice sans contrepartie. Ou alors le vice en question perdure en se déplaçant.

C’est le principe des vases communicants appliqué à un usage, une coutume ou un besoin ancré depuis des siècles. Vous le chassez d’un point, il revient ailleurs. C’est ce qui est apparemment arrivé aux fumeurs : s’ils ne peuvent plus fumer le jour, ils fument la nuit. S’ils ne peuvent plus ni fumer au travail ni dans les cafés, ils fument dehors et chez eux. Au risque d’enfumer les leurs. Avec une certitude : tant qu’un produit de substitution aussi puissant que le tabac ne sera pas proposé en compensation, les fumeurs continueront à fumer. A moins qu’ils ne se mettent à boire davantage. Mais là, nous n’avons pas encore les derniers chiffres…"


Courriel : greilsamer@lemonde.fr

LE MONDE | 22.12.08

L’avenir de Dolto

« Dolto, c’est du passé. Moi, je ne fais pas partie de cette bande là », disait un psy comportementaliste ce matin sur France Inter, sans oublier d’en appeler aux nouvelles méthodes de « discipline » dans l’éducation des enfants.

Quand j’étais interne en psychiatrie, je me suis vite rendu compte qu’il y avait des modes en matière de psychothérapie. Il y avait eu une génération d’internes qui avaient lu et choisi les idées de Paolo Alto, l’analyse systémique ou thérapie familiale. Puis, il y eu ceux qui s’intéressaient à l’hypnose Ericksonnienne, une resucée plus rapide des idées de Watzlawick car limitées à ce seul auteur. Puis, ceux qui étaient impressionné par l’aspect transgénérationnel, puis l’ethnopsychiatrie de Devereux, etc…

La particularité de ces modes était qu’une génération entière d’interne s’y engloutissait suivie par une autre. La génération suivante abandonnait les références de la précédente en denoncant son ancienneté, « c’est du passé », disaient-il en guise d’argument.

Alors quand j’ai vu arriver ceux qui ne jure que par Skinner, les comportementalistes, je me suis dit que cela leur passerait. Et cela passe déjà. En un sens, c’est déjà du passé. D’ailleurs, en ce moment, si j’en crois ce que j’entends, beaucoup d’internes s’intéressent plutôt à la théorie de l’esprit de Dennett.

Je crois que c’est là que je me suis dit que l’on ne choisi pas des auteurs, mais des idées. On ne choisit pas un courant de pensée, mais on décide de penser par soi même. Ni une éthique, mais son éthique en matière de psy.

Vous pouvez vous en rendre compte dès que vous recevez quelqu’un en entretien. Tout ce que vous avez pu lire avant, vous pouvez le ranger dans votre bibliothèque aussitôt. Pour suivre ce qu’il a à vous dire, il faudra oublier tout ça. Et c’est là que vous vous rendez compte que la faculté c’est bien pour les fondamentaux, les « réflexes » à avoir dans les conduites à tenir devant un patient. Mais pour le reste, c’est vos patients qui vous l’apprennent.

Alors, que faire pour se former en psy ?

J’ai pris le parti de lire tout azimuths et même en dehors de la psy. Pour apprendre. En restant critique, n’est-ce pas ? Enfin, si possible.

Là, vous pouvez vous rendre compte que chaque auteur dit des choses intéressantes, même quelqu’un comme Cottraux. Enfin bon, celui-là, ce que j’ai lu de lui était souvent assez noir… De l’humour certainement ?

Vous vous rendez compte aussi que des anciens peuvent dépasser le nouveaux. Et que les nouveaux croient parfois enfoncer des portes ouvertes. Enfin pour les comportementalistes, je devrais peut-être dire: fermer la porte à l’inconscient.

Alors pour Dolto, j’ai eu la chance d’entendre très jeune ce qu’elle disait à la radio. Et j’ai trouvé ça intéressant. Elle a peut-être fait parti de mes choix en matière d’orientation professionnelle. Et ce que je peux entendre ces jours-ci à l’occasion de sa rétrospective anniversaire, me parait encore et toujours pertinent.

Archives Françoise Dolto

Cycle Françoise Dolto sur France Inter

Pathologies mentales complexes: les thérapies de longue durée plus efficaces

Une psychothérapie « psycho-dynamique » est un euphémisme pour ne pas utiliser le mot qui fâche: psychanalyse… Enfin, les plus fâchés sont les comportementalistes, cognitivistes, et tutti quanti, tenant du traitement minute en matière d’aide et de soutien à l’autre ! Comme s’il était possible de comprendre quelque chose d’aussi complexe que la vie d’une personne en cinq minute… 

Voici une dépêche de l’AFP sur l’intérêt de se hâter lentement….

Des psychothérapies durant au moins un an paraissent plus efficaces pour traiter des pathologies mentales complexes que des interventions de courte durée recourant plus intensivement à des médicaments, selon une méta-analyse publiée mardi.

« Dans cette méta-analyse, les psychothérapies psycho-dynamiques de longue durée (au moins un an ou 50 séances) ont été nettement plus efficaces que des traitements intensifs courts quant aux résultats d’ensemble tout comme pour cibler des problèmes particuliers et améliorer le fonctionnement de la personnalité du patient », écrit le Dr. Falk Leichsenring, de l’Université de Giessen en Allemagne, un des co-auteurs de ces travaux.

Cette méta-analyse a porté sur 23 études dont onze cliniques et 12 dites d’observation ayant couvert 1.053 patients au total.

« Les psychothérapies psycho-dynamiques ont produit d’importants effets durables sur des patients souffrant de troubles de la personnalité, de troubles mentaux multiples et d’instabilité mentale chronique », poursuivent les chercheurs dont les travaux paraissent dans le Journal of the American Medical Association (JAMA) daté du 1er octobre.

« Les effets ont été mesurables pour l’ensemble des troubles et se sont accrus de façon notable entre la fin des séances de thérapies et les visites de suivi », ajoutent ces psychiatres.

En terme d’efficacité générale des deux types de traitements, les patients ayant bénéficié des psychothérapies psycho-dynamiques de longue durée ont enregistré en moyenne de meilleurs résultats dans plus de 96% des cas que ceux ayant été soumis aux thérapies intensives et brèves ».

AFP 01.10.08